mardi 16 décembre 2014

Asociale?


J'ai très longtemps cru que mes problèmes relationnels étaient dus au fait d'avoir été fille unique jusqu'à l'âge de huit ans. Ma maman me qualifiait souvent d'asociale. J'avais, paraît-il, plutôt mauvais caractère. Je disais des choses sans réaliser qu'elles pouvaient être blessantes pour les gens.

Je passais beaucoup de temps dans les livres - et lorsque j'étais ainsi absorbée, il était très difficile d'attirer mon attention. Alors les adultes qui tentaient d'engager la conversation avec moi me pensaient impolie. Le fait que je corrigeais leurs fautes de français, et que j'étalais le savoir appris dans des livres d'histoire naturelle, n'aidait pas à faire de moi une enfant agréable! Les livres étaient, peut-être, une échappatoire face aux autres. 

J'étais une enfant plutôt solitaire. A l'école, je ne jouais que rarement avec mes camarades. Me faire attraper en jouant "au loup" m'angoissait beaucoup, et comme je ne courais pas vite, j'avais peu de chances d'y échapper. Alors, j'évitais ces jeux.

Le jeu que je préférais, c'était "on disait". "On disait que j'étais un aigle... un loup... un astronaute." C'est un jeu pratique, parce qu'on peut aussi y jouer tout seul si personne d'autre ne veut se joindre à soi; et puis, on crée les règles que l'on veut. Je passais la plupart des récréations à déambuler dans la cour de l'école, sans but apparent pour qui m'aurait observée. Pourtant il s'en passait, des choses, dans ma tête! J'aimais l'automne, parce que je pouvais tracer le contour d'une maison avec les feuilles tombées des arbres, ou bâtir un nid. Et puis, je mâchais toutes sortes de choses, comme les bébés: mes gommes, mes crayons, du papier, des feuilles d'arbres. Pour la plupart de mes camarades, j'étais "folle" - mon comportement était différent du leur.

A l'adolescence, les choses ne se sont pas arrangées. J'étais toujours un peu différente, un peu à l'écart. L'internat m'a forcée à interagir avec les autres, vaille que vaille; le harcèlement scolaire était fréquent. Mais j'ai aussi eu quelques amis, des personnes qui, je suppose, passaient outre de ma bizarrerie et m'acceptaient telle que j'étais.

Quand j'ai commencé à travailler, j'ai continué à avoir des difficultés dans mes interactions avec les autres. Les malentendus étaient fréquents; il y avait toujours quelque chose qui clochait chez moi, et je ne m'en rendais pas vraiment compte - je me sentais simplement mal à l'aise, mais en même temps, j'avais pris l'habitude de ce malaise. Il faisait partie de ma vie.

Voyez-vous, mon syndrome d'Asperger n'a été diagnostiqué qu'en 2011. C'est alors seulement que j'ai compris pourquoi mes rapports aux autres avaient généralement été empreints de ce malaise.

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